La macabre application de la charia dans les universités afghanes
Un macabre pont s’est tracé entre 2001 et 2021. Depuis le 16 août les femmes afghanes ne respirent plus, ne vivent plus. Considérablement marginalisées, leurs droits sont niés à commencer par les possibilités de construire, par elles-mêmes, leur futur.
Un cynique positionnement
Afin d’être reconnu par les puissances occidentales les talibans affirmaient vouloir préserver les droits de tous les citoyens du pays, femmes et hommes compris. Néanmoins, ces déclarations se confondent avec les appels à implanter un « authentique régime islamique » dont le droit se borne à l’application de la charia. Cette duplicité est illustrée dans la décision du Ministre de l’Enseignement supérieur Abdul Baqi Haqqani qui, le 29 août 2021 a annoncé que les femmes afghanes seraient autorisées à se rendre à l’université en respectant la charia. En d’autres termes, la mixité est abrogée, les étudiantes devront être instruites par des enseignantes et porter le voile intégral. De la même manière, les programmes scolaires seront réécrits conformément aux valeurs liberticides du régime pour qu’il soit « en accord avec nos valeurs islamiques, nationales et historiques ».
Des trajectoires déçues
Quelles sont donc ces valeurs ? Durant la période talibane de 1996-2001 les femmes n’étaient autorisées ni à recevoir une éducation, ni à travailler ; elles étaient persécutées, lapidées et mariées de force. Il s’agit d’un ignoble retour en arrière alors même que depuis vingt ans les Afghanes arrachaient durement leur liberté. En témoigne la trajectoire d’Aisha Khurram, étudiante et représentante de la jeunesse afghane aux Nations Unies. Elle qui allait obtenir son diplôme de l’Université de Kaboul dans les mois à venir a perdu toute perspective d’émancipation en une fraction de seconde. « C’est un cauchemar pour les femmes qui ont fait des études, qui envisageaient un avenir meilleur pour elles-mêmes et pour les générations futures ». N’hésitant pas à comparer la situation à la « fin du monde », les femmes afghanes crient à l’aide et recherchent d’actives oreilles, cette décision reflétant un processus graduel d’exclusion de l’espace public et de cantonnement à l’espace privé marqué par la violence endémique d’une société misogyne et patriarcale.
L’exclusion de l’espace public
Malgré l’autorisation officielle, le climat de peur généralisé s’est installé. « La peur reste en vous comme un oiseau noir », déclare Muska Dastageer, maîtresse de conférences à l’Université américaine d’Afghanistan, « il déploie ses ailes et vous ne pouvez plus respirer ». Les femmes constituent la population la plus menacée et la plus exposée du pays. En effet, les talibans cherchent à les effacer de l’espace public : dans une université privée de lugubres tâches noires ont remplacées les photographies des visages de celles qui façonnaient un futur meilleur pour leur pays. De la même manière, beaucoup de femmes ont arrêté de recevoir une éducation, craignant pour leur vie. Chacune a en mémoire le terrible attentat du 8 mai 2021 visant une école pour filles de Kaboul. Ce jour-là 85 petites filles sont mortes. 85 femmes à qui on a nié le droit à l’éducation, à l’émancipation, à la réflexion. 85 femmes qui ne pourront pas entrer dans la vie publique, devenir magistrate, docteure, artiste, journaliste, militante, professeure. 85 femmes dont les corps morts ont maculé le sol de sang. Les talibans ne se sont pas modernisés, ils sont encore moins devenus fréquentables, ils sont une menace qu’il nous faut conjointement combattre ! Dans un souci humanitaire, nous appelons donc l’ensemble des pouvoirs publics mais également de la société civile, chaque individu, à son échelle, à développer des pensées et un élan de solidarité à destination des femmes afghanes.
Nous appelons donc, à tous les niveaux, à la plus grande solidarité envers les victimes!
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