Remboursement des contraceptions hormonales : Une victoire vers l’égalité au cœur de l’intime
Le 9 septembre, le ministre de la Santé Olivier Véran annonce qu’à compter du 1er septembre 2022, la contraception hormonale, le bilan biologique qui l’accompagne ainsi que la consultation, la prescription et l’ensemble des soins qui y sont liés seront « pris en charge » pour toutes les femmes jusqu’à 25 ans. Le Docteure Emmanuelle Piet, présidente du Collectif Féministe contre le Viol et l’une des principales animatrices du Planning Familial en Seine-Saint-Denis revient les luttes ayant permis d’aboutir à cet immense pas en avant pour toutes les femmes.
« C’est une victoire, l’aboutissement de revendications portées depuis plus de vingt ans. »
En finir avec la précarité contraceptive
Pour la militante et docteure Emmanuelle Piet, l’annonce du 9 septembre est l’aboutissement de « revendications portées depuis plus de vingt ans ». En effet, plusieurs organisations publiques et associatives, du Mouvement du Planning Familial au Haut Conseil pour l’Egalité entre les Femmes et les hommes se sont mobilisées pour inscrire ce problème à l’agenda ministériel. Un rapport du Haut-Conseil pour l’Egalité avait été rendu un rapport en juillet 2017 sur l’importance de rendre universel l’accès au soin en incluant dans les mesures de santé les femmes précaires.
Ainsi, la mesure permettra à 1,6 million de bénéficiaires potentielles de lever les considérations financières qui peuvent constituer des freins au recours à la pilule. En effet, selon Marianne Niosi, directrice de la Confédération du Planning Familial « on reçoit des femmes dans une situation de précarité telle que la consultation et la contraception peuvent représenter une charge trop lourde ». En cela, la mesure répond à un vide pour les femmes entre 18 et 25 ans qui n’avaient pas accès au RSA et donc à la CMU qui permettait déjà de bénéficier de la pilule gratuite. Emmanuelle Piet nous appelle donc à nuancer les critiques face à ce seuil de 25 ans « la pilule ne doit pas être nécessairement gratuite pour tout le monde ; pour les femmes qui ne sont pas en situation de précarité, elle ne représente pas un investissement impossible à tenir, 1,50 euros tous les mois avec la Sécurité Sociale. Ce n’est pas grand-chose, c’est tout d’abord les femmes pauvres qu’il faut accompagner. »
Une reconnaissance publique et officielle de la nécessité du recours à la contraception
La déclaration d’Olivier Véran marque une véritable évolution de société : de la condamnation morale des femmes à une reconnaissance de la nécessité des moyens contraceptifs. A la question Comment était la situation avant pour les femmes désireuses de choisir leur grossesse ? Emmanuelle Piet nous dépeint l’histoire horrifiante de femmes mises en danger par l’institution médicale. En effet, « Avant 74, il n’était pas possible d’avoir recours à la contraception en France. Certes, il y avait la loi Neuwirth de 1967 mais les décrets d’application ont été bien plus tardifs. Avant, on risquait la prison si on parlait de contraception. Tous les mois, les femmes vivaient dans la peur d’être enceinte. Si on avait de l’argent, on trouvait un moyen d’avorter en Belgique ou encore en Angleterre, mais les femmes les plus pauvres allaient voir les faiseuses d’ange. Ces dernières mettaient une sonde hospitalière, un petit tuyau d’arrosage ou même une tringle à rideau en guise de sonde abortive. Tout cela était dangereux : les bactéries circulaient et provoquaient de septicémies. Dans cette société de la peur, les hôpitaux portaient plaintes, dénonçaient et même punissaient les patientes qui venaient en raison d’un avortement aux conséquences terribles : ils inséraient une cuillère et grattaient à vif. Maintenant on a des méthodes normales d’avortement et un accès renouvelé et agrandit à la contraception ; il faut continuer à défendre cela ».
Les dangers de la montée d’un discours anti-contraceptif
« C’est extrêmement fragile, et c’est d’autant plus fragile qu’on ne le défend pas ». En marge de la déclaration d’Olivier Véran, beaucoup de commentateurs ont jugé cette mesure en décalage avec les réelles causes de non-recours à la pilule contraceptive à savoir une défiance grandissante chez les jeunes vis-à-vis de la pilule et un refus d’assumer seule le contrôle de la grossesse. Pour Emmanuelle Piet, il s’agit là d’un contresens. « Les hommes ne seront jamais enceinte, la répartition de la charge mentale ne sera donc jamais totale ! La pilule représente le moyen pour la femme d’avoir un outil sûr et qu’elle maîtrise. Cette mesure permet de lutter contre le non-recours motivé par des raisons financières et c’est déjà un énorme pas en avant car la pilule a des avantages au-delà du contrôle de la fertilité : lutter contre l’anémie, apaiser les douleurs des femmes souffrant d’endométriose, arrêter les règles… Le gouvernement se doit de présenter des politiques de santé offensives afin de contrer ce contraception-bashing qui dénature le débat ».
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