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Un podcast à découvrir: « Mes sorcières catalanes mieux aimées ? »

Un podcast à découvrir: « Mes sorcières catalanes mieux aimées ? »

février 24, 2022

Article France Culture écrit par Anthony Bellanger,

A découvrir sur : https://www.franceinter.fr/emissions/la-chronique-d-anthony-bellanger/histoires-du-monde-du-vendredi-28-janvier-2022

Le parlement catalan a décidé de rendre hommage à des centaines de femmes brûlées pour sorcellerie entre les XVe et XVIIIe siècles. Avec quelques arrières pensées bien contemporaines tout de même.

Le parlement catalan a rendu hommage aux centaines de femmes brulées
Le parlement catalan a rendu hommage aux centaines de femmes brulées © Getty / MartiSaiz

Direction la Catalogne qui a rendu hommage à des centaines de sorcières (de femmes accusées de sorcellerie et exécutés pour ce « crime » entre les XVe et XVIIIe siècle en Catalogne).

Pour leur rendre justice, le Parlement régional a voté mercredi une résolution solennelle réhabilitant ces femmes

Ce geste est d’ailleurs loin d’être unique en Europe : d’autres parlements ont approuvé des textes similaires. On peut citer la Suède, l’Ecosse, la Suisse et, déjà en Espagne une autre assemblée régionale : celle de Navarre, dans le nord du pays, en 2019.

On sait combien de femmes sont concernées grâce au travail de plusieurs historiens mais surtout d’une revue, « Sapiens », et d’un historien catalan, Pau Castell, de l’université de Barcelone, qui a pu retrouver les noms d’un peu moins d’un millier de femmes exécutées en Espagne en trois siècles – dont au moins 700 en Catalogne, qui est donc l’endroit en Espagne où la persécution a été la plus intense.

Mona Chollet, auteur (entre autres livres) de "Sorcières : la puissance invaincue des femmes"

C’est si vrai que la première loi en Europe punissant un crime de sorcellerie a été élaborée en Catalogne, dans la vallée d’Áneu, en 1424 !

Par contre, il faut savoir que, malgré l’inquisition et sa légende noire, le pays en Europe où l’on a le plus exécuté de sorcières n’est pas l’Espagne, mais l’Allemagne et l’Europe de l’Est avec 40 000; à 60 000 victimes en trois siècles. A côté, le millier de victimes espagnoles parait presque dérisoire.

Cette « mobilisation »» catalane a donc avant tout des motivations politiques bien contemporaines. Qui a voté cette motion en Catalogne ? D’abord, des partis très à gauche qui ont la défense des droits des femmes chevillé au corps.

Comme la députée féministe Jenn Díaz qui a déclaré « Nous sommes les héritières des sorcières, des empoisonneuses, des guérisseuses. La seule différence c’est qu’aujourd’hui on nous appelle des féminazies ».

Et puis, il y a les indépendantistes catalans.

“La sorcière”, huile sur toile de Jean-François Portaels Vilvorde, 1818

Car parmi les nombreux griefs du catalanisme politique envers Madrid, il y a l’incapacité coupable – selon eux- de l’État espagnol à reconnaitre ses crimes passés, à commencer par ceux commis par le régime Franquiste.

Et c’est vrai qu’en échange de la démocratie, les partis politiques espagnols ont accepté de voter en 1977 une loi empêchant tout procès des crimes commis pendant la guerre civile et la dictature du général Franco.

Donc, en adoptant cette motion réhabilitant les sorcières, Barcelone fait la leçon à Madrid.

Les parlementaires catalans disent « Nous en Catalogne, on fait face à notre part d’ombre et on sait honorer les victimes d’injustice passées ».